Vertige

Souvenirs, regrets, souvenirs, regrets, toujours cet obsédant enchaînement, sans répit, de tous les instants. Douleur sourde et lancinante. Je n'ai pas pleuré aujourd'hui, j'en ai été incapable, même quand j'ai vue les larmes de Daniela. Ça m'aurait fait du bien pourtant. Je n'ai pas trouvé la force. Le cœur est comme ankylosé, figé dans une douleur même pas aiguë. Tous mes efforts, toutes les choses que j'ai entreprises aujourd'hui n'ont pas réussi à m'absorber suffisamment.

Je crois que j'ai fait l'erreur de regarder trop loin devant. J'ai été assailli, terrassé par ce vertige. Je dois me concentrer davantage sur l'immédiat, le court terme, la survie, là, maintenant.Faire abstraction n'est pas possible, mais s'infliger une surdose de "plus jamais" n'est pas une bonne chose, que ce soit pour les petits moments tendres ou amusants ou pour les grands moments de cette vie mise brutalement au conditionnel. Ça me tétanise et ne me laisse plus que comme impression la seule douleur, plus que comme seule couleur le gris.

Il y a sans doute un lien avec l'état actuel de la maison et la météo. Ma sensibilité à ce genre de facteur a été particulièrement accru. Aujourd'hui le temps était venteux et maussade, les nuages menaçants. Comme le jour de son accident. Puis les travaux et les arrangements que l'on a entrepris pour progresser dans notre projet, pour aller de l'avant, ont transformé la maison en vaste capharnaüm, aucun espace serein, aucune vision apaisante.

C'est le cap qu'il faut tenir, reprendre le dessus, à nouveaux se fixer de petits objectifs, ne pas se laisser embarquer par les souvenirs et les regrets trop loin de là où l'on se trouve à l'instant. A nouveau autour de soi, aménager des zones de paix extérieures pour en atteindre des intérieures.